Fletcher B. Cox |
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Company
"Anti-Tank", 377th Infantry Regiment |
Vers la fin de Mars
1945, alors que les Alliés avait la maîtrise totale du
contrôle aérien sur le continent Européen, le
Commandement Suprême des Forces Expéditionnaires Alliés
(SHAEF) décida de lancer une offensive blindée à l’Est
du Rhin et de frapper au cœur de l’Allemagne.
Tous ceux
qui ont appris la technique du Blitzkrieg en 1940
connaissent le principe : des colonnes blindées
supportées par l’aviation frappaient là où étaient
situées les résistances françaises, et celle-ci
capitula rapidement.
Maintenant
nous étions en train d’utiliser la même tactique, et
moi – en tant que Private First Class parmis tant
d’autres – je jouais un très petit rôle dans la Task
Force Baker du Combat Command A, 2nd Armored
Division, en progressant dans la partie Nord de la vallée
de la Ruhr. Notre mission était de détruire toute résistance
et de continuer notre progression. Les autres troupes nous
suivaient pour garder en totale sécurité le couloir que
nous avions créé et nettoyer les dernières poches de résistance
que nous avions contourné.
Notre colonne était guidée par trois chars. Juste
derrière eux suivaient pas moins de six – et peut-être
plus (je ne m’en rappelle pas)—équipes anti-tank
transportées dans des camions 1½ ton remorquant des
canons de 57mm. Suivaient ensuite beaucoup de soldats de
la 96th Infantry Division, transportées dans des camions
2½ ton. Suivaient alors les grosses pièces
d’artillerie tractées par d’immenses véhicules. De
nombreux camions remplis de fantassins, de soldats du génie
et d’autres chars complétaient le reste de la colonne.
Notre colonne traversa le Rhin sur un pont du Génie
le 30 mars 1945 à 6h00 du matin, et débuta son avancée
près de Peddenburg.
L’équipe anti-tank dans laquelle j’étais
incorporée était juste derrière les premiers chars au
moment où nous avons traversé la zone où des fantassins
avaient creusé leur trous individuels.
Je
n’oublierai jamais le regard étonné d’un de ces
fantassins lorsqu’il sortit de son trou individuel pour
nous voir partir vers l’Est. Je crois qu’il commença
à penser qu’il allait probablement survivre jusqu’à
la fin de la guerre en Europe.
Nous étions donc désormais en territoire ennemi.
Mais où étaient-ils ?
Voilà ce qu’était le rôle des équipes de
canons anti-tank. Comme convenu, une ou deux équipes étaient
placées à chaque intersection pour protéger les flancs
du convoi jusqu’à ce que le dernier élément soit passé.
Ensuite, le canons étaient à nouveau accrochés à
l’arrière des véhicules, l’équipage montait à
bord, et nous remontions à chaque fois le convoi pour se
positionner plus loin.
J’avais
une position exceptionnelle lorsque j’ai vu nos chars
tirer sur un convoi ferroviaire allemand et forçant les
soldats allemands à partir en courant. Notre équipe était
autre part lorsque les chars ont détruit un convoi
motorisé. Plus tard, alors que l’équipe d’attaque
faisait une pause, les fantassins détruisirent les poches
de résistance allemandes près de Augustdorf.
Notre équipe
anti-tank composée de dix hommes, et qui était positionnée
sur la ligne de front au début de Novembre 1944, avait été
extrêmement chanceuse. Nous étions régulièrement
victimes de tirs de mortiers ou d’obus dans le but de
nous tuer mais aucun de nous ne fut blessé. Je ne me
rappelle pas avoir reçu des tirs directs jusqu’alors.
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Ci-dessus
: Photographie de l'équipe Anti-Tank de
Fletcher B. Cox prise à Metz en Novembre 1944.
Fletcher est à l'extrême droite de la photo. |
Nous avons été positionnés à un intersection en
“T” de deux routes pavées. Nous devions garder le
flanc droit de la colonne qui tournait à gauche à cet
endroit.
Nous avons
donc placé notre canon de 57mm entre la route et la
maison en briques faisant l’angle, le pointant vers la
route de droite. Le conducteur Walt Hunt gara le camion
entre les bâtiments. Nous avons déchargé quelques
munitions anti-tank, les avons placées derrière le
canon, et nous nous sommes alors assis en attendant.
Le convoi nous dépassait, tournait sur la gauche
au carrefour afin de suivre les chars qui fonçaient vers
le centre de l’Allemagne.
Soudainement, à environ 800m de la route que nous
étions en train de protéger, un véhicule camouflé
apparu et venait lentement dans notre direction. A ce
moment un couple Allemand jeune et bien habillé
transportant un bébé passa à pied juste devant nous et
se dirigea vers le véhicule qui continuait de
s’approcher. Apparemment, ils venaient de quitter une église
car nous entendions des cloches sonner.
Notre chef d’équipe,
le Squad Sergeant Al Arndt, se mit immédiatement derrière
notre canon et regarda avec ses jumelles en direction du véhicule.
Un des notre ou un des leurs? Tank ou autre chose ?
Il ordonna à
Bob Trial de traverser la rue et de se positionner dans un
trou avec notre mitrailleuse .30 refroidie par air. Jimmy
Powers et moi composions l’équipe bazooka et nous nous
préparions à courir sur le flanc droit pour attaquer si
notre canon serait détruit.
Nous
observions et attendions.
Lorsque le véhicule
et le couple Allemand arrivèrent au même niveau, le véhicule
s’arrêta et un homme sortit de la tourelle, apparemment
pour demander ce qu’ils avaient vu au carrefour. A ce
moment, après avoir visualisé l’uniforme de l’armée
allemande, Al ordonna : “Feu”.
Il y eu un déluge
de feu Durant un court instant. Notre tireur, Earl
Honeycutt, détruisit le véhicule, qui était en fait un
véhicule de reconnaissance blindé allemand, en trois
tirs. Trial, de l’autre côté de la rue, consomma une
bande complète de cartouches pour la mitrailleuse et nous
fit signe qu’il avait besoin d’en avoir d’autre.
Pendant ce
temps, le soldat à l’intérieur de la tourelle était
en train de nous tirer dessus avec une mitrailleuse et un
canon de 20mm. Les camions de 2½ ton s’arrêtèrent et
des soldats descendirent pour nous supporter.
Arndt cria, "Cox, amène çà (caisse de munitions) à
Trial!" Je sortis du bâtiment , traversa la rue sans
être touché, m’allongea tout près de Trial et
introduisit une nouvelle bande de munitions dans la
mitrailleuse. A ce moment, soudainement, les tirs s’arrêtèrent.
Aucun de
notre équipe et des fantassins nous ayant soutenus
n’avaient été touchés.
Ils remontèrent
dans les camions et la progression de la colonne recommença.
Dès que la
fin de la colonne blindée nous avait rattrapée, nous
avons démonté nos armes, accroché notre canon anti-tank
à l’arrière du camion, et nous avons ensuite remonté
la colonne blindée afin de nous repositionner à un autre
carrefour. Le véhicule allemand avait été laissé là,
détruit et personne n’y s’est approché.
Plus tard, nous avons appris que l’un des trois
tirs de Earl, celui qui toucha le milieu de l’avant du véhicule,
toucha les jambes du conducteurs qui saigna tellement
qu’il mourut assis à son poste. Je ne sais pas ce qui
s’est passé pour les autres Allemands : le couple
et celui qui tirait depuis la tourelle.
Mais je sais ce qu’il s’est passé pour moi.
Une épiphanie.
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Ci-dessus
: Photographie prise à Bruxelles en 1945
juste avant que la division ne retourne aux États-Unis. |
Pendant tout le reste de ma vie, je me suis rappellé
lorsque Al Arndt m’a ordonné de traverser la rue, et je
l’ai fait ! C’est quelque chose que l’on se rappelle !
Je n’arrête
pas de penser aux centaines de milliers de fantassins qui
ont du faire face à de telles situations alors qu’ils
étaient sur le front. Des milliers ont été tués et
beaucoup plus ont été sérieusement blessés.
Les fantassins de la ligne de front sont mes héros,
tous autant que les autres.
Maintenant,
pour un peu d’ironie. Un gars était avec notre équipe
lors de nos premiers combats, et lorsque nous avons attaqué
Metz, il a demandé (et l’a été) à être transféré
dans l’équipe de cuisinier, qui était toujours en arrière
de nos positions, c’est à dire loin du front. Il avait
une épouse et un enfant aux Etats-Unis.
Durant notre attaque éclair en Allemagne Centrale,
peu avant la fin de la guerre en Europe, notre équipe
s’installa près d’un bâtiment et se faisait servir
du café pendant que nous protégions le flanc de la
colonne blindée. C’est à ce moment que notre colonne a
été mitraillée par un avion allemand, l’un des rares
qui restait à la luftwaffe. Notre ancien copain d’équipe
tenta de se protéger dans un des camions de l’équipe
cuisine, mais fut touché par un obus 20 mm et fut tué
sur le coup.
Le reste de notre équipe rentra saine et sauve aux
USA.
Je riens à remercier
Fletcher B. Cox pour son magnifique témoignage et ses
photographies.
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