Le
Château Brieux
Date
: Nuit du 8 Novembre 1944 |
Lieu
des faits : Maizières-lès-Metz, France |
Unité
présente : Company "I", 377th Inf.
Reg. |
The
Battles of George S. Patton's Lowest Ranks - Fourth
Edition.
Les
nouveaux arrivants du 3rd battalion du 377th
Infantry Regiment découvrent qu'il y a encore du travail
à faire pour s'attaquer à la sortie orientale de Maizières-lès-Metz:
un secteur boisé comprenant le château Brieux. Cet
objectif doit être nettoyé avant l'ouverture de la route
menant à Metz. Le soldat Bodnar fait parti des unités
qui attaquent le château dans le nuit du 8 Novembre 1944.
Blessé lors de cet assaut, il sera amputé d'une partie
de sa jambe à cause de la gangrène. Cette attaque fut un
terrible échec même s'il fut brave. Voici son témoignage
de toute l'opération :
La I
/ 377 à l'assaut du Château Brieux, raconté par le
Private First Class Stephen J. Bodnar. Company "I",
377th Infantry Regiment.
« La
I company du 377th Infantry Regiment de la 95th Infantry
Division a relevé
une company de la 90th Infantry Division le 1er
Novembre 1944. L’unité
a pris position dans la dernière rue de Maizières-lès-Metz.
Le 1st Platoon a pris position près d’une école.
Notre Squad, la 3rd Platoon, occupait un immeuble près de
l’école. La section de mortiers, le 4th platoon, était
installée dans la cour derrière l’école.
Durant la semaine précédant l’attaque du château
Brieux, le 3rd Squad envoyait nos patrouilles
chaque nuits afin localiser les positions ennemies et les
zones minées. Une nuit, celui-ci fut envoyé avec
d’autres éléments d’une 1st platoon pour
tenter de capturer des prisonniers. Tous les hommes du 1st
platoon sont revenus sains et saufs. La nuit suivante, le
commandant du platoon, le 1st Lieutnant James Cain, était
sérieusement blessé et le PFC Jay Stone blessé légèrement
lors d’une nouvelle patrouille. Lieutnant Cain fut donc
remplacé par le 2nd Lieutnant Peterson Cavert.
Le temps a commencé à devenir mauvais. Il faisait
assez froid et humide, environ 6 ou 7°C. Le 7 novembre,
il a commencé à pleuvoir. Ce jour-là, c'était les élections
aux États-Unis et le Président Franklin Roosevelt
souhaitait faire un quatrième mandat.
Au cours de la journée du 8 Novembre 1944, le
Lieutnant Cavert planifia l’attaque du Château Brieux
pour 21h00, avec la participation de notre squad.
L’attaque devait être précédée par un tir de barrage
de notre artillerie la même nuit. Notre platoon, le 1st,
attaquera le château en longeant le côté gauche de la
route menant vers la porte du château, le contournera et
tentera d’y pénétrer. Le 3rd Platoon
devra mener l’attaquer en longeant le côté droit de la
route, le contournera et y pénètrera aussi. Ces deux
platoons avait pour but d’encercler le château et
d’empêcher les Allemands de mener une contre-attaque
alors que le 2nd Platoon s’emparait du
château. Lieutnant Cavert demanda à notre squad si
quelqu’un avait à donner des commentaires sur ce plan.
Pendant un court moment, personne ne parla jusqu’à ce que
le Lieutnant Cavert nous dise qu’on pouvait dire ce que
l’on pensait sans avoir de problèmes. En tant que
soldat de 19 ans, avec rien à perdre sauf sa vie (et j’étais
extrêmement confient que j’étais immortel), j’ai
parlé. Bien que je ne me rappelle pas exactement de mes
mots, j’ai dit que c’était un « sale »
plan. La Company n’avait encore jamais réalisé
d’attaques de jour.. On ne nous avait jamais entraîné
pour un combat de nuit, depuis que j'ai rejoint mon unité,
en Février 1944. La plupart des hommes n’avaient jamais
participé à des patrouilles de nuit. En plus il pleuvait
et faisait vraiment sombre cette nuit. J’ai dit que
l’attaque était vouée à l’échec, et que nous
allions être anéantis. Après un court instant de
silence, Lieutnant Cavert demanda si quelqu’un d’autre
avait quelque chose à rajouter. Personne ne s’exprima
et nous sommes donc préparés pour l’attaque.
Munitions supplémentaires et grenades étaient
distribuées aux assaillants. J’ai pris deux cartouchières
d’allègement pour mon fusil, plusieurs clips pour mon
M-1 dans les poches de mon pantalon et 4 grenades à main
pour les poches de ma veste. Nous étions seulement
autorisés à emporter le strict minimum dans nos sac,
imperméable et quelques rations K. J’avais quelques
souvenirs en supplément que je gardais (sucreries et
petites boites de conserve de fruits) que je partageais
avec Ceo Bauer et d’autres amis de mon équipe. Après
avoir vérifié que mon fusil était correctement nettoyé,
j’étais prêt.
Lieutnant Cavert demanda si quelqu’un savait
tirer au bazooka. PFC Ceo Bauer répondit rapidement
qu’il avait tiré une fois lors de son « basic
training ». Lieutnant Cavert assigna donc Bauer en
tant que tireur de bazooka et les PVT John Ahern et Harold
Kellog en tant que pourvoyeur et transporteur de
munitions. C’était la première fois que Bauer et moi
étions séparés pour un combat. J’ai alors pensé que
Bauer avait dit un mensonge en mentionnant qu’il avait
tiré au bazooka lors d’un entraînement. Ceo Bauer fut
blessé, Ahern et Kellogg furent tués durant l’attaque
de nuit du château.
Parce qu’il faisait trop sombre, tout le monde
s’est accroché des mouchoirs blancs sur chaque bras et
sur l’arrière des sacs afin d’éviter que l’on se
tire dessus (Friendly Fire). L’artillerie a commencé
ses tirs vers 20h45 avec ses canons de 105 et 155mm.
Lieutnant Cavert nous informa que le XXe Corps voulait
aussi utiliser des canons de 240mm, mais nous étions trop
prêt de l’ennemi pour qu'ils puissent être utilisés.
Cependant, quelques jours auparavant, les Allemands nous
ont tiré une vingtaine d’obus de 240mm
...
Lorsque
nous avons commencé à marcher vers le château, nous
avions les bras tendus et nous nous tenions mains par
mains avec les hommes de chaque côté, ainsi une sorte de
longue ligne était maintenue.
Arrivés près du château, nous nous sommes détachés,
pris nos fusils et nous nous sommes préparés à engager
l'ennemi. L'artillerie et les mortiers allemands ont
commencé à tirer quand notre artillerie a commencé à
frapper les zones devant le château. Comme nous
avancions, je suis tombé dans un trou d'obus,
partiellement rempli d'eau. Pendant un cours instant, j'ai
pensé rester ici, non par peur, mais en pensant que
l'attaque serait un désastre et qu'elle ne réussirait
pas. Cependant, j'ai pensé que c'était mon devoir
d'aider mes camarades, que je rejoints rapidement pour
l'assaut. J'ai demandé de l'aide pour qu'on puisse
m'aider à ressortir du trou car j'étais dans la boue
jusqu'aux genoux. Je ne me rappelle pas qui m'a aidé,
parce que je n'ai pas pu le voir. Je lui ai recommandé de
ne pas s'approcher trop près et de tendre son bras. Nous
nous sommes accrochés par la main et j'ai pu sortir du
trou d'obus.
Comme je m'approchait de la
ligne de barbelés en face d'un poste allemand, une
mitrailleuse s'est mise à tirer sur le flanc droit de mon
platoon. Je me suis arrêté et j'ai tiré trois rapides
coups, le fusil à la hanche. La mitrailleuse s'est alors
braquée vers moi et a commencé à tirer. C'est à ce
moment que je fus touché au bas de ma jambe droite. Ça
m'a paru comme si quelqu'un m'avait frappé avec une batte
de base-ball dans la jambe, et je suis alors tombé.
"Fils de pute " que j'ai crié, plus surpris que
souffrant. Où est-donc passée mon immortalité ? C'était
un tir continu de mitrailleuse et de fusils des deux côtés,
des tirs, des explosions, et les obus allemands tombaient
de partout. Au moment d'une explosion, j'ai aperçu grâce
à la lumière que ma jambe avait été touchée. Un peu
paniqué, j'ai commencé à appeler un médecin. Personne
ne venait. J'ai alors pensé que le médecin de notre équipe
avait été lui aussi blessé ou tué durant cette attaque
de nuit. Il y avait énormément de blessés. Ceo Bauer
m'a entendu appeler l'aide d'un médecin, il s'approcha et
me demanda de rester calme, me disant que je n'avais pas
été touché. C'est seulement 15 ans après qu'il me
reparla de cette incident. Avec le vacarme et le peu de
lumière, la remarque qu'il m'avait faite me semblait
ridicule, mais j’ai pensé qu'aucun médecin n'allait
venir et que j'allais devoir m'occuper moi-même de mon
cas. J'ai alors décidé de ramper vers nos lignes de défenses,
à la recherche d'un éventuel médecin. A contre-cœur,
j'ai décidé d'abandonner mon fusil car il m'empêchait
de ramper correctement. En revenant vers nos positions le
Staff Sergeant Robert Lauderbaugh et le PFC John Weiss, de
l'équipe de mitrailleuse soutenant le premier platoon,
s'approchèrent, me relevèrent et m'aidèrent à me
ramener vers l'arrière.
A chaque fois que les obus allemands arrivaient,
nous tombions par terre. Lorsque les tirs allemands se
sont intensifié, ils se sont protégés dans un tour
d'obus. Finalement, une équipe s'occupa de moi et me
chargea sur le capot d'une jeep et pour m’emmener à une
station de secours. Après un long, sinueux et irrégulier
chemin en pleine nuit, nous sommes arrivés à la station
de secours. Le captain Joseph Herbert, le médecin de la
station, me demanda si je possédais des munitions. Je dis
"oui" et on m'enleva les grenades et clips de
cartouches que j'avais dans les poches de mon pantalon et
de ma veste. Mes cartouchières et mon ceinturon avaient déjà
été enlevées auparavant.
Seuls les éléments du 1st platoon étaient
parvenus à leurs objectifs mais étaient en mauvaise
posture. L'attaque du 3rd battalion avait échoué et les
éléments avaient du se replier. La I Company avait été
protégée par le 4th platoon qui était équipé de
mortier. Ils ont tiré plus de 900 coups. L'attaque du 3rd
platoon avait été repoussée et le 2nd
platoon avait donc du annuler son action sur le château.
Le
commandant du 2nd platoon, le First Lieutnant
W. Lawrence Krueger, volontaire pour mener une équipe de
patrouille afin d'entrer en contact avec les élément du
1st platoon les ramena en sécurité à Maizières.
Le jour suivant, à 15h45, la company lança un
nouvel assaut au château… Cette fois-ci, ce fut un succès.
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Ci-dessus :
Vestiges
du Château Brieux à Maizières-lès-Metz.
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Durant ces deux attaques, la company perdit la
moitié de ses effectifs, environ 90 blessés ou tués.
Le 11 novembre 1944, ma jambe droite a été amputée
parce que la gangrène s'était déclarée. J'étais très
malade et cette opération était nécessaire pour me
sauver la vie.
Il y avait d'autres membres de mon équipe dans le
même hôpital de campagne : Bauer, Coleman, Ross… Je me
rappelle que tous me parlaient lorsque je devenais de plus
en plus souffrant. Charles Coleman s'était cassé une
jambe. Cependant, il développa plus tard une infection et
mourut dans un hôpital en angleterre. Je me rappelle
aussi que le chef de mon équipe, le staff-sergeant Harold
Griese était venu me
voir après que ma jambe ait été amputée.
J'ai ensuite été envoyé dans un hôpital aux USA
à Atlantic City, dans le New Jersey. Là, je rencontra le
second commandant de mon platoon, le Lieutnant Krueger.
Nous avons discuté au sujet des attaques du château
Brieux. J'ai clairement exprimé mon opinion en disant
qu'une attaque nocturne du château avait été une
mauvaise idée et que nous n'avions pas fait appel à de
hautes stratégies. Le lieutnant Krueger me dit que la
95th ID ne voulait pas attaquer de nuit et avait demandé
au XXth corps d'attendre le lever du soleil du 9 Novembre.
Le XXth Corps avait accepté cette demande, mais pas
Patton. Patton voulait de l'action à ce moment précis.
Il l'a eu, et c'est la company I du 377th Infantry
Regiment qui paya le prix…
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A
gauche :
Plaque
dédiée aux soldats de la I Company, 377th Infantry
Regiment pour leurs actions héroïques. |
Mes
remerciements à Stephen J. Bodnar pour son magnifique témoignage
:"I Company 377 Infantry 95 Division attacks Chateau
Brieux."
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